mercredi 9 octobre 2013

Une auteure en situation difficile

Nouvelle commission d'attribution de bourses pour des auteurs et illustrateurs jeunesse, hier. Parmi les dossiers qui défilent, celui d'une auteure qui a déjà une douzaine de titres dans sa bibliographie, dont au moins deux appréciés par les lecteurs et la critique. C'est moi qui les ai lus, et je confirme qu'ils sont de bonne qualité, bien écrits, à partir d'un sujet intéressant. Le synopsis et l'extrait du roman sur lequel elle est actuellement en train de travailler, et pour lequel elle demande une bourse, sont prometteurs. Ses personnages sont intéressants, son style travaillé, et elle change à chaque fois de contexte ou d'époque, ce qui demande de longues recherches.
Qui plus est, contrairement à certains auteurs qui reviennent trop souvent, elle n'a encore jamais demandé d'aide. Elle explique qu'une bourse lui permettrait d'avoir l'esprit tranquille, financièrement parlant, pendant le temps nécessaire à l'élaboration et l'écriture de son roman. Elle ajoute que si elle sollicite une bourse à présent alors qu'elle n'en avait pas eu besoin jusqu'ici, c'est parce qu'elle a connu une grosse baisse de revenus récemment. En effet, elle a dû déménager pour suivre son conjoint à qui on a proposé un poste en Chine, et là-bas, bien sûr, elle ne peut pas faire des rencontres scolaires, des interventions, des ateliers d'écriture, tout ce travail "à-côté" qui représente au moins la moitié des revenus des auteurs jeunesse (car il faut savoir que bien peu d'auteurs jeunesse pourraient gagner leur vie uniquement grâce à leurs droits d'auteurs, même parmi les plus talentueux. Triste à dire, mais vrai). Elle ne touche donc plus que 600 ou 700 euros par mois, et même si son mari gère les dépenses courantes, c'est peu.
Un dossier en or, donc.
Aucune objection ?
Attendez, juste une seconde avant de lui accorder l'aide maximale. Pourquoi donc cette femme et son mari ont-il accepté ce poste en Chine, alors qu'ils savaient que ça aurait pour conséquence une telle baisse de revenu du couple ?
Ah, oui.
Ah, d'accord.
Parce que le mari gagne plus de 12.000 euros par mois.
OK.

Nous lui avons répondu que son travail nous semblait tout à fait intéressant, que son désir d'indépendance financière était compréhensible, que ses motivations étaient louables, tout ça tout ça, mais que, heu... non, quoi.





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