mercredi 23 janvier 2013

Un agent immobilier susceptible

— Allô ? Oui, bonjour Madame, je vous téléphonais pour savoir si vous vouliez toujours vendre l'appartement pour lequel j'avais réalisé une estimation il y a quelque temps...
— Ah oui, je l'ai mis en vente, donc si vous avez des clients potentiellement intéressés, vous pouvez venir le visiter avec eux.
— Pardon ? Vous l'avez mis en vente ? Et chez qui, je vous prie ?
— Heu... chez une agence de quartier, et un autre d'un grand réseau...
— Oh. Je vois. Vous avez donc fait l'inverse de ce que je vous avez conseillé. Je vous avais bien parlé de notre politique qui favorise les mandats exclusifs, pourtant, non ?
— Si, mais...
— Vous avez préféré le mettre chez plusieurs agences, sachant que ça dévalorise un bien, que les acheteurs vont le retrouver sur plusieurs sites internet et se demander ce qui cloche, pourquoi il ne se vend pas...
— Mais non, je...
— Vous savez, j'ai eu une dame qui avait fait comme vous, elle l'avait mis chez plein d'agences différentes, du coup ça a fait fuir les acheteurs, elle a dû baisser le prix, et malgré tout ça ne s'est pas vendu ; elle a fini par faire appel à moi, pour que je sauve sa vente, ce que j'ai fait, bien sûr, mais que de temps perdu !
— Mais...
— Je suis étonnée que votre mari ait consenti à ça, il m'avait paru très raisonnable. Nous devrions peut-être nous revoir tous les trois pour en reparler.
— Je vous assure pourtant que mon "mari" est d'accord avec moi... Et puis vous savez, c'est mon appart !
— Franchement, vous êtes sur la mauvaise pente. Vous vous êtes mal engagée, et vous allez vous en mordre les doigts. Je dis ça pour vous, pas pour moi, hein. Moi, je m'en fiche.
— Ah ?
— Bon, enfin, puisque le mal est fait, tant pis, on va faire un mandat simple, sans exclusivité. Mais c'est vraiment dommage que vous ne m'ayez pas écouté. Je vais avoir du mal à rattraper le coup, oui, beaucoup de mal. Quand voulez-vous que je passe ?
— Écoutez, monsieur, vous êtes vraiment très aimable, mais je m'en voudrais de vous donner un tel surcroît de travail. Et puis vos arguments m'ont convaincue : il vaut mieux ne pas mettre un bien en vente dans trop d'agences différentes, donc je vais m'en tenir aux deux que j'ai déjà choisies. Merci de votre appel, et au revoir !

(Non mais sans blague !)

5 commentaires:

  1. Oh là là, je crois qu'il va convoquer tes parent chez le proviseur...

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  2. J'admire ta faculté à ne pas être prise de court, à faire passer ton point de vue, et à l'enrober de la politesse d'usage.
    Dans le feu de l'instant, je ne sais pas comment moi j'aurais retraduis en propos "Stop! Je vous emmerde. *raccroche*"

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  3. Oh, tu sais, c'est une retranscription, et même si la plupart des phrases sont authentiques, le dialogue réel a été nettement plus long que ça ! Je n'ai pas été aussi mordante que je l'aurais souhaité, mais je suis tout de même très fière d'avoir réussi à lui dire "non merci" en retournant ses propres arguments contre lui. J'aurais voulu lui dire aussi que si j'avais besoin qu'il me "sauve", comme la dame de son histoire, je le rappellerais, mais je n'ai pas osé...

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  4. Le coup du mari ça me rappelle un type qui voulait nous vendre un assainissement pour la maison et qui, lors de la prise de rdv, préférait que mon mari soit là parce que "ce serait mieux" alors qu'il n'y connaît rien du tout et que c'est moi qui gère tous les devis et rdv avec les artisans.

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