samedi 3 mars 2012

Pollyanna

J'avais promis de vous parler de ce livre qui a beaucoup marqué mon enfance, et chose promise, chose due !

Pollyanna est un un roman américain d'Eleanor H. Porter écrit en 1913, donc en gros, à la même époque que Les quatre filles du docteur March, La petite princesse, Anne et la maison aux pignons verts, Papa Longues-jambes et d'autres ultra-ultra-classiques américains de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, pleins de bons sentiments et surtout destinés aux filles. Si ces titres ne vous disent rien, c'est normal, car en dehors du premier, ils n'ont jamais eu beaucoup de succès en France. Pourtant, je vous assure que dans de nombreux pays, en particulier bien sûr dans tous les pays anglo-saxons, Pollyanna est un personnage aussi connu que Tom Sawyer ou Mary Poppins. Elle est même entrée dans le dictionnaire pour désigner "une personne d'un optimisme béat", et a sa statue dans la ville d'origine de sa créatrice, Littleton. Qui dit mieux ?

Qui est-elle donc, cette délicieuse enfant ? Une pauvre orpheline que le destin conduit à habiter avec sa tante, une vieille fille stricte et acariâtre. Mais Pollyanna a appris à jouer avec son père au "jeu du contentement", qui consiste à trouver en toutes circonstances une raison de se réjouir. Ainsi, quand sa tante la relègue dans une petite chambre sous les toits laide et surchauffée alors que sa maison contient plein de chambres luxueuses et inoccupées, Pollyanna se réjouit de la vue magnifique, et même de ne pas avoir de miroir, puisque cela lui évitera d'avoir à se lamenter sur ses taches de rousseur ! Forcément, chaque tentative de la punir tourne court : quand sa tante la condamne à dîner avec du pain et du lait dans la cuisine, elle lui saute au cou pour la remercier, car elle aime le pain, le lait, et la compagnie des domestiques !
Son optimisme, sa franchise déconcertante, sa naïveté et sa gentillesse vont peu à peu faire d'elle la mascotte de la ville. Parmi ses conquêtes, on compte Mrs Snow, une invalide éternellement ronchon, et Mr Pendleton, un célibataire asocial. Et aussi le docteur Chilton, brouillé avec sa tante pour une raison mystérieuse...
Sa gaieté est cependant mise à rude épreuve le jour où, victime d'un accident, elle apprend qu'elle risque de ne plus jamais pouvoir marcher. Mais cet épisode lui permet de mesurer l'amour que tout le monde lui porte, y compris (enfin !) sa tante, et bien entendu, tout finit bien pour tout le monde !

Allergiques aux bons sentiments, passez votre chemin ! A côté, même Les quatre filles du docteur March est un roman noir. Dans Pollyanna, le malheur existe, mais pas le mal. Et c'est justement pour ça que je l'ai tant aimé, enfant, et pour ça qu'il a tant marqué les esprits. Et en dehors de la joie de vivre qu'il communique aux lecteurs, il faut reconnaître que ce roman possède bien d'autres qualités : des personnages hauts en couleur, des dialogues très drôles, des retournements de situation inattendus, une narration parfaitement maîtrisée, etc.
Malheureusement, vous ne pourrez en profiter que si vous lisez l'anglais (ou l'italien, ou le polonais, ou n'importe quelle autre langue dans lequel le roman a eu du succès et est encore disponible), ou à la rigueur si vous êtes très riche, car s'il a bien été traduit en français en 1929 aux éditions Jeheber, il est aujourd'hui quasiment introuvable : je viens de le voir sur Priceminister pour la modique somme de... 400 euros. Et tous mes efforts pour le faire rééditer en français auprès d'éditrices avec lesquelles je travaille ont été vains.

Quelques mots encore au sujet des suites :
- Un deuxième volume a été écrit par Eleanor H. Porter, Pollyanna grandit. Je le trouve moins réussi. Au début, l'histoire se répète – Pollyanna redonne le goûte de vivre à une femme maussade, et trouve un parent adoptif à un orphelin –, et ensuite, ça se transforme en roman à l'eau de rose très classique, avec quiproquos amoureux et happy end romantique. J'apprécie également moins les personnages, plus sombres et moins pittoresques que dans le premier volume.
- Beaucoup d'autres suites ont été écrites pour profiter du succès de l'original, un peu comme pour Heidi, mais elles ne sont pas de la même auteure, et je ne les ai jamais lues.

Enfin, au sujet des adaptations :
- Un film de Walt Disney a été tourné en 1960, et pour une fois, je l'ai vu. En toute honnêteté, il n'est pas mal, même si ça ne casse pas des briques. L'histoire est un peu différente, et je trouve que l'actrice principale n'est pas assez rayonnante et spontanée pour incarner Pollyanna, mais on passe tout de même un bon moment.
- Un dessin animé japonais d'une cinquantaine d'épisodes a été diffusé en France à la fin des années 80. La maison de production est Nippon Animation, la même qui a produit "Tom Sawyer" et "Princesse Sarah", et le dessin animé a eu pas mal de succès et a été rediffusé un certain nombre de fois. Ceux qui le connaissent s'en souvienne avec plaisir.
Autrement dit, même si je n'aime pas les adaptations, puisque les francophones monolingues ne pourront de toute façon pas lire le roman, je vous autorise pour une fois à faire une exception !

PS : Ici et ici, deux autres blogueuses qui parlent de leur amour pour ce roman.

Post-scriptum d'avril 2016 : après des décennies d'oubli, Pollyanna est enfin ressorti dans une édition française, chez Zethel. Je l'ai relu en diagonale, et la traduction d'Elisabeth Luc est tout à fait convenable (même si j'aurais fait mieux, cela va sans dire). Vous n'avez donc plus aucune excuse pour ne pas lire le roman plutôt que vous contenter des adaptations, même si vous êtes monolingue. Allez, hop, on file chez le libraire !


7 commentaires:

  1. Je connaissais vaguement l'anime, mais pas le livre. Faudra que je le lise en VO parce que ce n'est pas le moment de mettre 400€ dans un bouquin.

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  2. J'ai trouvé il y a quelques années tous les volumes de Pollyanna, en français, pour une poignée d'euros. Je n'ai pas mesuré toute ma chance à l'époque ! Je me suis régalée avec ces livres, mêmes si les derniers sont en effet un peu répétitif. La morale est belle.
    Et puis, si un jour j'ai des besoins financiers, je les vendrai 400 Euros pièce. Il suffit de trouver un acheteur !!!

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  3. Il y a eu aussi en version film, Polly, dans une communauté noire (je me souviens que la tante, était l'actrice du Cosby Show..)

    Et l'histoire a également bercée mon enfance :)

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  4. Bonjour, je ne connaissais pas du tout Pollyana, mais j'en ai rêvé et j'étudie mes rêves dans le cadre d'une psychanalyse, est ce que vous auriez la gentillesse de me décrire la personnalité de pollyana en quelques mots ? parle t on de ses parents biologiques ? merci

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  5. En un seul mot, même : positive ! Toujours joyeuse, toujours prête à voir le bon côté des choses, à croire qu'il y a un bon fond même chez les gens les plus désagréables, et convaincue que le bonheur se trouve dans la vie quotidienne, qu'il suffit de savoir le voir. Sa mère est morte très tôt, peut-être à la naissance, en tous cas elle ne se souvient pas d'elle, et son père (qui est celui qui lui a appris le "jeu du contentement", donc on peut supposer qu'il avait un caractère également optimiste) était missionnaire, ils vivaient ensemble aux Indes, il me semble, et Pollyanna l'adorait, avant qu'il ne meure de maladie et que Pollyanna ne soit envoyée vivre chez sa tante, vers 10 ans.

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  6. Bonjour et merci pour cet article! :)
    Un petit message pour vous informer de la sortie d'une nouvelle version française du livre en avril! Je n'y croyais plus!

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    1. En effet, je l'avais vu sur Amazon mais dans la catégorie "albums" donc je pensais que c'était un truc résumé... Si c'est bien le texte intégral, c'est une excellente nouvelle, en effet !

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